Un Long Dimanche de Fiançailles [Film]
Publié : 28 octobre 2004, 08:55
Attendu par la moitié de la population française et notamment le nombre incalculable de fans d'Amélie Poulain, le dernier film de Jeunet, Un Long Dimanche de Fiançailles, vient de sortir au cinéma.
L'histoire se base sur le livre éponyme de Sébastien Japrisot. C'est l'histoire de Mathilde, une jeune fille jouée par Audrey Tautou, amoureuse de Manech (Gaspard Ulliel). Dans la fin des années 10, c'est la sale guerre et nombre de jeunes gens seront envoyés au front, à Verdun ou ailleurs. Et Manech est de ceux-là. A la fin de la guerre, on annonce à Mathilde la mort de Manech, mais elle est convaincue que ce dernier est vivant et entreprend donc de se mettre à sa recherche.
Dès les premières minutes, le principal écueil du film apparaît à l'écran. On débute par une présentation de cinq condamnés à mort, certains diront une liste à la Prévert. Et on ne peut s'empêcher de penser à Amélie Poulain au départ similaire. La présence d'Audrey Tautou tout en douceur et presque en naïveté nous ramènera de la même façon au précédent film de Jeunet. Ce sentiment de revoir le même film s'estompe légèrement au court du film, mais il ressurgit dès qu'on se met à parler de ce Long Dimanche.
Malgré les quelques ressemblances, Un Long Dimanche de Fiançailles est largement plus dur, plus adulte que Amélie Poulain. Les scènes du front sont parfois difficiles, et rendent, je pense, bien compte de l'horreur de cette guerre : froid, pluie, tranchées, soldats à la baïonette contre des tanks et des mitraillettes... Ici la couleur grise l'emporte sur le jaune sépia du reste du film. Gris comme le ciel, gris comme les casques, gris comme les uniformes, gris, tristement gris.
Les couleurs justement me mènent à parler de l'esthétisme "Jeunet" que d'aucuns estiment comme trop visible. Comme il l'a dit lui-même, il aime quand on voit au court de ses films que l'argent a servi à faire quelque chose. Pour cela, il soigne particulièrement ses décors et son image. On se sent vraiment transporté dans une autre époque (même si quelques détails peuvent choquer). Les reconstructions des années 20 sont magnifiques, notamment le passage devant la Gare de Lyon. Au contraire de nombreux autres films français, ce film est un bonheur pour les yeux (moins pour les oreilles du fait de la musique pas vraiment très originale, du violon en-veux-tu-en-voilà). Et la touche "Jeunet" est toujours présente, comme dans une scène faisant immanquablement penser à Delicatessen.
Et surtout la touche "Jeunet" c'est un ensemble de personnages qui font qu'un film de Jeunet est un film de Jeunet. On y retrouve nombre d'acteurs fétiches : Dominique Pinon, Audrey Tautou, Jean-Claude Dreyfus, Rufus (que je n'ai pas vu mais il est crédité au générique), Ticky Holgado, Urbain Cancelier ainsi qu'une pleïade de seconds rôles dont la liste ferait pâlir nombre de réalisateurs : Jodie Foster, Jean-Paul Rouve, André Dussollier, Albert Dupontel, Philippe Duquesne, Jean-Pierre Darroussin, Marion Cotillard, Tchéky Karyo, Julie Depardieu.... Et tout le monde insuffle à son personnage juste ce qu'il faut, ni plus, ni moins. Et même les moins connus, comme Chantal Neuwirth dans le rôle de la tante de Mathilde, sont magnifiques et campent leur personnage avec une justesse extraordinaire.
Et pour finir Jeunet c'est tout un ensemble d'accents et de petits mots. Ticky Holgado nous apporte l'accent du Sud, Jean-Paul Rouve son parler célèbre du Radio-Bière-Foot... On y parcourt la France du Nord à la Corse, de la Bretagne à Paris, avec à chaque fois des joyaux d'authenticité. Et puis que serait ce film sans les petites phrases émaillant les dialogues : "Chien qui pète, joie sur ma tête", "Monsieur Pire! Pire qu'une fouine, pire que pire ça n'existe pas"... Sans oublier les noms des personnages (mais peut-être est-ce dû à Japrisot) : Bastoche, Célestin Poux, Benoît Notre Dame, Biscotte, Six Sous...
Jean-Pierre Jeunet est en passe de devenir l'un des réalisateurs les plus côtés du cinéma français. Et pour copier une célèbre phrase, parce qu'il le vaut bien. Son film est magnifique, mais a le malheur de passer après un Amélie Poulain et de rester trop ressemblant au Fabuleux Destin. Et peut-être aussi de rester un peu trop dans cette nostalgique francitude d'autrefois. S'il n'est pas le film du siècle, Un Long Dimanche de Fiançailles reste un très bon film!
Notes :
Histoire : 6/10
Décors et images : 10/10
Acteurs : 10/10
Note finale : 8/10
L'histoire se base sur le livre éponyme de Sébastien Japrisot. C'est l'histoire de Mathilde, une jeune fille jouée par Audrey Tautou, amoureuse de Manech (Gaspard Ulliel). Dans la fin des années 10, c'est la sale guerre et nombre de jeunes gens seront envoyés au front, à Verdun ou ailleurs. Et Manech est de ceux-là. A la fin de la guerre, on annonce à Mathilde la mort de Manech, mais elle est convaincue que ce dernier est vivant et entreprend donc de se mettre à sa recherche.
Dès les premières minutes, le principal écueil du film apparaît à l'écran. On débute par une présentation de cinq condamnés à mort, certains diront une liste à la Prévert. Et on ne peut s'empêcher de penser à Amélie Poulain au départ similaire. La présence d'Audrey Tautou tout en douceur et presque en naïveté nous ramènera de la même façon au précédent film de Jeunet. Ce sentiment de revoir le même film s'estompe légèrement au court du film, mais il ressurgit dès qu'on se met à parler de ce Long Dimanche.
Malgré les quelques ressemblances, Un Long Dimanche de Fiançailles est largement plus dur, plus adulte que Amélie Poulain. Les scènes du front sont parfois difficiles, et rendent, je pense, bien compte de l'horreur de cette guerre : froid, pluie, tranchées, soldats à la baïonette contre des tanks et des mitraillettes... Ici la couleur grise l'emporte sur le jaune sépia du reste du film. Gris comme le ciel, gris comme les casques, gris comme les uniformes, gris, tristement gris.
Les couleurs justement me mènent à parler de l'esthétisme "Jeunet" que d'aucuns estiment comme trop visible. Comme il l'a dit lui-même, il aime quand on voit au court de ses films que l'argent a servi à faire quelque chose. Pour cela, il soigne particulièrement ses décors et son image. On se sent vraiment transporté dans une autre époque (même si quelques détails peuvent choquer). Les reconstructions des années 20 sont magnifiques, notamment le passage devant la Gare de Lyon. Au contraire de nombreux autres films français, ce film est un bonheur pour les yeux (moins pour les oreilles du fait de la musique pas vraiment très originale, du violon en-veux-tu-en-voilà). Et la touche "Jeunet" est toujours présente, comme dans une scène faisant immanquablement penser à Delicatessen.
Et surtout la touche "Jeunet" c'est un ensemble de personnages qui font qu'un film de Jeunet est un film de Jeunet. On y retrouve nombre d'acteurs fétiches : Dominique Pinon, Audrey Tautou, Jean-Claude Dreyfus, Rufus (que je n'ai pas vu mais il est crédité au générique), Ticky Holgado, Urbain Cancelier ainsi qu'une pleïade de seconds rôles dont la liste ferait pâlir nombre de réalisateurs : Jodie Foster, Jean-Paul Rouve, André Dussollier, Albert Dupontel, Philippe Duquesne, Jean-Pierre Darroussin, Marion Cotillard, Tchéky Karyo, Julie Depardieu.... Et tout le monde insuffle à son personnage juste ce qu'il faut, ni plus, ni moins. Et même les moins connus, comme Chantal Neuwirth dans le rôle de la tante de Mathilde, sont magnifiques et campent leur personnage avec une justesse extraordinaire.
Et pour finir Jeunet c'est tout un ensemble d'accents et de petits mots. Ticky Holgado nous apporte l'accent du Sud, Jean-Paul Rouve son parler célèbre du Radio-Bière-Foot... On y parcourt la France du Nord à la Corse, de la Bretagne à Paris, avec à chaque fois des joyaux d'authenticité. Et puis que serait ce film sans les petites phrases émaillant les dialogues : "Chien qui pète, joie sur ma tête", "Monsieur Pire! Pire qu'une fouine, pire que pire ça n'existe pas"... Sans oublier les noms des personnages (mais peut-être est-ce dû à Japrisot) : Bastoche, Célestin Poux, Benoît Notre Dame, Biscotte, Six Sous...
Jean-Pierre Jeunet est en passe de devenir l'un des réalisateurs les plus côtés du cinéma français. Et pour copier une célèbre phrase, parce qu'il le vaut bien. Son film est magnifique, mais a le malheur de passer après un Amélie Poulain et de rester trop ressemblant au Fabuleux Destin. Et peut-être aussi de rester un peu trop dans cette nostalgique francitude d'autrefois. S'il n'est pas le film du siècle, Un Long Dimanche de Fiançailles reste un très bon film!
Notes :
Histoire : 6/10
Décors et images : 10/10
Acteurs : 10/10
Note finale : 8/10