Dracula (Bram Stocker) [Livre]
Publié : 29 mars 2003, 17:13
Dracula. Juste ces trois syllabes, jetées sur une page blanche. Ça ne paye pas de mine. Et pourtant, tant de symboles sont rattachés à ces trois petites syllabes. La vampirisme évidemment. Mais aussi lamour. Lélégance. La cruauté.
Dracula est le digne héritier dun roman de John Polidori. Polidori, en 1817, publia une nouvelle intitulée « Le Vampire ». Pour la petite histoire, « Le Vampire » est né suite à un pari entre le poète Lord Byron et Mary Shelley : la rédaction en une journée dune histoire de fantôme. Mary Shelley accoucha de Frankenstein. Lord Byron dun début de nouvelle, « Le Vampire ». Polidori alors son secrétaire, rangea les feuilles ettermina le texte qui paru par la suite sous le nom de Byron
Plutot mal écrit (jai pu constater par moi même) « Le Vampire » à le mérite de poser les bases du vampire moderne. Sous limpulsion de Polidori, le vampire sortira de son statut de cadavre ambulant et développera un personnage de noble aristocrate, distingué et séducteur. Linfluence de Polidori sur Dracula est dailleurs indéniable si on lis les deux romans en parallèle : on retrouve le même profil vampirique ainsi quune trame de fond similaire. Venu quelques jours en Transylvanie pour régler des affaires immobilières avec un certain Comte Dracula, Jonathan Harker apprendra à ses dépends la vrai nature de son hôte. Dans « Le Vampire » , le jeune Aubrey, de passage à Londres, se liera avec un étrange seigneur fréquentant la haute société, quil finira par démasquer lui aussi
Polidori dans ses bagages, fasciné par le magnifique « Carmilla » de Le Fanu, Bram Stocker avait déjà matière à cogiter, sans parler des légendes des Balkans traitant du vampirisme quil consulta avec passion. Mais il fallait à Stocker quelque chose dautre pour entamer un roman. Un personnage fort. Il le trouva dans le folklore roumain : le prince Vlad IV. Dirigeant de la Valachie, Vad IV est un héritier de la lignée des « Dracul » (nom déjà porté par son père), signifiant « diable » ou « dragon » suivant le sens. Sa cruauté était elle quelle lui valu également le sobriquet de Vlad lEmpaleur (« Vlad Tepes » en Roumain), supplice quil affectionnait particulièrement. Persécuteur des envahisseurs Turc et farouche représentant de lordre et de la loi, Vlad Dracul extermina des populations entières, hommes, femmes enfants. Les méfaits de Dracul le fit passer pour un « vampyr », diable en Roumain, suite à un pacte supposé avec le Seigneur des Ténèbres.
Fort de ces références, Bram Stocker écrit et publiera en 1897 ce qui deviendra lun des piliers de la littérature vampirique. Rédigé sous la forme dun roman épistolaire, par lettre, article et journeaux intimes interposé, Dracula peut se découper en plusieurs parties. La première, intitulé dailleurs « linvité de Dracula » narre la rencontre du Comte Dracula et de Jonathan Harker. Dans cette première partie, plutot rapide, on retrouve quelques allusions à Le Fanu : Dracula ne mange ou ne bois jamais en présence de Jonathan, séclipse durant la journée pour ne revenir que le soir. « Linvité de Dracula » ne révèle pas encore la nature du Comte, mais ces détails troublants et lachèvement de cette partie ne laissent aucun doute sur sa nature diabolique. Ensuite une autre partie introduit dautres personnages fondamentaux du roman : Mina Murray (future Mina Harker), son amie Lucy et bien entendu le Dr Van Helsing. A cela sajoute le Dr Seward qui traite un curieux patient, Renfield, dans son hopital psychiatrique. Fascinant malade mental insectophage, Renfield entretiendra au fil du roman une liaison télépathique avec Dracula. Trouvant la force de sy opposer, il y perdra la vie. Par sa connaissance historique du mythe du vampire, le Dr Van Helsing sera un allié précieux dans la lutte contre Dracula et pour libérer Lucy et Mina, toutes deux possédés par le pouvoir ( et le charme ?) du Comte. Malgré ses effort, Lucy subira la transformation et devra être achevé selon les rites. Enfin, la dernière partie consacrée au combat final contre Dracula
Dracula rassemble plusieurs style littéraire. Larrivé de Jonhatan Harker nest pas sans faire penser à certains roman daventure. De même, la lutte contre Dracula évoque des thèmes chers aux romans de chevalerie : les preux héros combattant un monstre, de belles dames et le professeur Van Helsing, à la fois conseiller, combattant et maitre spirituel, qui a tout dun Merlin. Ainsi que certains moments de terreur pur qui nont rien à envier aux auteurs modernes. Un passage notamment : larrivé de Dracula en Angleterre est introduite par le journal de bord dun navire sinistré, où il est décrit la disparition de chaques marins au fil nes nuits. Sappuyant constamment sur ses références, Polidori et Le Fanu en tête, Bram Stocker se permet également certains écarts ou interprétation pour les besoins de son uvre. Ainsi, les légendes indiquent quun vampire ne peut traverser leau courante. Lhistoire voulant que Dracula prenne le bateau pour transiter de sa Transylvanie natale à lAngleterre, Stocker transforme la clause : il ne peut traverser leau quà la marée montanteDe mêmes les multiples métamorphoses de Dracula (chauve-souris et loup), si elles sont évoquées dans le folklore passent ici à un plan nettement supérieurs. On retrouve également certains clins dil : lexecution des vampires, du moins sur le plan technique, sinspire encore une fois de certaines légendes, mais surtout du « Carmilla » de Le Fanu. Lucy, devenu une non-morte, sera surnommé la « Dame en sang », ce qui pour moi est une référence évidente à la comtesse Bathory. Appelé la « Comtesse de Sang », Elizabeth Bathory croyait avoir trouvé le secret de la jouvence dans le bain de sang quotidien. Plus de 650 victimes auraient durant le 16ème siècle contribué à remplir sa baignoire
Dracula est un monument de la littérature vampirique, mené de main de maitre par un auteur maitrisant très bien son sujet. Plutot que de plagier ses références, Stocker leurs rendra un hommage subtile tout au long de son roman. Le style épistolaire, qui peut paraître rébarbatif au premier abords, ajoute au suspens et permet au lecteur dévluer au même rythme que les protagonistes. Dracula inspira de nombreuses autres uvres. Citons Anne Rice, chez qui lon retrouve lélégance et le rafinement, mais aussi le caractère impitoyable de ces créatures.
Je ne peut pas finir cette critique sans parler du personnage de Dracula au cinéma. De la Hammer à Coppola, de Bela Lugosi à Gary Oldmann, Dracula fut un pain béni pour les studios. Confronté à Jonathan Harker, à Renfield, à lincrevable Van Helsing ou encore a Charlots ( ! ), Dracula à marqué les écrans comme la littérature. Pour moi, la plus fidèle adaptation reste celle de Coppola. Non content de respecter le livre, Coppola suit la démarche de Stocker en interprétant à son tour certains passages de luvre : ainsi Lucy et Mina deviennent plutot intime (référence à Le Fanu, qui introduit lhomosexualité dans le vampirisme ? ) , Dracula peut sortir le jour, non sans en être très affaibliDe plus, si le Dracula décris par Stocker ne ressemble en rien à Gary Oldmann, lacteur à néanmoins de faux airs deVlad Tepes.
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Dracula est le digne héritier dun roman de John Polidori. Polidori, en 1817, publia une nouvelle intitulée « Le Vampire ». Pour la petite histoire, « Le Vampire » est né suite à un pari entre le poète Lord Byron et Mary Shelley : la rédaction en une journée dune histoire de fantôme. Mary Shelley accoucha de Frankenstein. Lord Byron dun début de nouvelle, « Le Vampire ». Polidori alors son secrétaire, rangea les feuilles ettermina le texte qui paru par la suite sous le nom de Byron
Plutot mal écrit (jai pu constater par moi même) « Le Vampire » à le mérite de poser les bases du vampire moderne. Sous limpulsion de Polidori, le vampire sortira de son statut de cadavre ambulant et développera un personnage de noble aristocrate, distingué et séducteur. Linfluence de Polidori sur Dracula est dailleurs indéniable si on lis les deux romans en parallèle : on retrouve le même profil vampirique ainsi quune trame de fond similaire. Venu quelques jours en Transylvanie pour régler des affaires immobilières avec un certain Comte Dracula, Jonathan Harker apprendra à ses dépends la vrai nature de son hôte. Dans « Le Vampire » , le jeune Aubrey, de passage à Londres, se liera avec un étrange seigneur fréquentant la haute société, quil finira par démasquer lui aussi
Polidori dans ses bagages, fasciné par le magnifique « Carmilla » de Le Fanu, Bram Stocker avait déjà matière à cogiter, sans parler des légendes des Balkans traitant du vampirisme quil consulta avec passion. Mais il fallait à Stocker quelque chose dautre pour entamer un roman. Un personnage fort. Il le trouva dans le folklore roumain : le prince Vlad IV. Dirigeant de la Valachie, Vad IV est un héritier de la lignée des « Dracul » (nom déjà porté par son père), signifiant « diable » ou « dragon » suivant le sens. Sa cruauté était elle quelle lui valu également le sobriquet de Vlad lEmpaleur (« Vlad Tepes » en Roumain), supplice quil affectionnait particulièrement. Persécuteur des envahisseurs Turc et farouche représentant de lordre et de la loi, Vlad Dracul extermina des populations entières, hommes, femmes enfants. Les méfaits de Dracul le fit passer pour un « vampyr », diable en Roumain, suite à un pacte supposé avec le Seigneur des Ténèbres.
Fort de ces références, Bram Stocker écrit et publiera en 1897 ce qui deviendra lun des piliers de la littérature vampirique. Rédigé sous la forme dun roman épistolaire, par lettre, article et journeaux intimes interposé, Dracula peut se découper en plusieurs parties. La première, intitulé dailleurs « linvité de Dracula » narre la rencontre du Comte Dracula et de Jonathan Harker. Dans cette première partie, plutot rapide, on retrouve quelques allusions à Le Fanu : Dracula ne mange ou ne bois jamais en présence de Jonathan, séclipse durant la journée pour ne revenir que le soir. « Linvité de Dracula » ne révèle pas encore la nature du Comte, mais ces détails troublants et lachèvement de cette partie ne laissent aucun doute sur sa nature diabolique. Ensuite une autre partie introduit dautres personnages fondamentaux du roman : Mina Murray (future Mina Harker), son amie Lucy et bien entendu le Dr Van Helsing. A cela sajoute le Dr Seward qui traite un curieux patient, Renfield, dans son hopital psychiatrique. Fascinant malade mental insectophage, Renfield entretiendra au fil du roman une liaison télépathique avec Dracula. Trouvant la force de sy opposer, il y perdra la vie. Par sa connaissance historique du mythe du vampire, le Dr Van Helsing sera un allié précieux dans la lutte contre Dracula et pour libérer Lucy et Mina, toutes deux possédés par le pouvoir ( et le charme ?) du Comte. Malgré ses effort, Lucy subira la transformation et devra être achevé selon les rites. Enfin, la dernière partie consacrée au combat final contre Dracula
Dracula rassemble plusieurs style littéraire. Larrivé de Jonhatan Harker nest pas sans faire penser à certains roman daventure. De même, la lutte contre Dracula évoque des thèmes chers aux romans de chevalerie : les preux héros combattant un monstre, de belles dames et le professeur Van Helsing, à la fois conseiller, combattant et maitre spirituel, qui a tout dun Merlin. Ainsi que certains moments de terreur pur qui nont rien à envier aux auteurs modernes. Un passage notamment : larrivé de Dracula en Angleterre est introduite par le journal de bord dun navire sinistré, où il est décrit la disparition de chaques marins au fil nes nuits. Sappuyant constamment sur ses références, Polidori et Le Fanu en tête, Bram Stocker se permet également certains écarts ou interprétation pour les besoins de son uvre. Ainsi, les légendes indiquent quun vampire ne peut traverser leau courante. Lhistoire voulant que Dracula prenne le bateau pour transiter de sa Transylvanie natale à lAngleterre, Stocker transforme la clause : il ne peut traverser leau quà la marée montanteDe mêmes les multiples métamorphoses de Dracula (chauve-souris et loup), si elles sont évoquées dans le folklore passent ici à un plan nettement supérieurs. On retrouve également certains clins dil : lexecution des vampires, du moins sur le plan technique, sinspire encore une fois de certaines légendes, mais surtout du « Carmilla » de Le Fanu. Lucy, devenu une non-morte, sera surnommé la « Dame en sang », ce qui pour moi est une référence évidente à la comtesse Bathory. Appelé la « Comtesse de Sang », Elizabeth Bathory croyait avoir trouvé le secret de la jouvence dans le bain de sang quotidien. Plus de 650 victimes auraient durant le 16ème siècle contribué à remplir sa baignoire
Dracula est un monument de la littérature vampirique, mené de main de maitre par un auteur maitrisant très bien son sujet. Plutot que de plagier ses références, Stocker leurs rendra un hommage subtile tout au long de son roman. Le style épistolaire, qui peut paraître rébarbatif au premier abords, ajoute au suspens et permet au lecteur dévluer au même rythme que les protagonistes. Dracula inspira de nombreuses autres uvres. Citons Anne Rice, chez qui lon retrouve lélégance et le rafinement, mais aussi le caractère impitoyable de ces créatures.
Je ne peut pas finir cette critique sans parler du personnage de Dracula au cinéma. De la Hammer à Coppola, de Bela Lugosi à Gary Oldmann, Dracula fut un pain béni pour les studios. Confronté à Jonathan Harker, à Renfield, à lincrevable Van Helsing ou encore a Charlots ( ! ), Dracula à marqué les écrans comme la littérature. Pour moi, la plus fidèle adaptation reste celle de Coppola. Non content de respecter le livre, Coppola suit la démarche de Stocker en interprétant à son tour certains passages de luvre : ainsi Lucy et Mina deviennent plutot intime (référence à Le Fanu, qui introduit lhomosexualité dans le vampirisme ? ) , Dracula peut sortir le jour, non sans en être très affaibliDe plus, si le Dracula décris par Stocker ne ressemble en rien à Gary Oldmann, lacteur à néanmoins de faux airs deVlad Tepes.
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