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(danse) May B - Maguy Marin

Publié : 04 mars 2007, 13:08
par Lilly
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MAY B
Chorégraphie : Maguy Marin
Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape
Note : 8,5
La troublante fascination de labsurde

Voilà plus de deux décennies que Maguy Marin a rencontré sur son parcours Samuel Beckett. Voilà 25 ans que Maguy Marin a créé May B, faisant le pari de retransmettre lunivers du dramaturge en gestuelle plutôt quen mots. Drôle de pari. Drôle au sens de bizarrerie, cette bizarrerie, cette drôlerie qui teinte toujours les pièces de cet auteur de théâtre hors du commun. Le Théâtre de lAbsurde se métamorphose donc sous la baguette de lincontournable chorégraphe, en Danse de lAbsurde.

La danse de labsurde cest un peu tout ce à quoi on ne sattend pas quand on se rend au spectacle de danse. Ici, pas de beaux mouvements amples et esthétiquement parfaits, pas de déplacements gracieux des corps. Ici, un groupe de personnages enfarinés, un groupe dextraterrestres, de malades échappés dun asile, de morts vivants fantomatiques, de zombies humanisés On ne sait pas vraiment. Toujours est-il que leurs regards, leurs allures, leurs petits gestes saccadés, leurs mouvements rythmés et synchronisés à la perfection mécanique, ont un quelque chose dinquiétant. Dinquiétant, ou de fascinant. De fascinant ou bien de ridicule. De ridicule ou dhumoristique. Chez Beckett comme chez Marin, ce qui fait peur fait rire.

Qui sont-ils ? Que font-ils ? Pas didentification claire de ces ombres blanches qui évoluent et scandent des sons, parfois crient des mots, sans sens apparent. Pourtant, ces déplacements grégaires circulaires évoquent ce que chacun voudra bien y voir de notre société, de nos comportements routiniers, du non sens qui nous entoure, de ces gestes quon reproduit sans trop savoir pourquoi, du poids du collectif sur lindividu etc. Et puis il y a ces moments dallégresse collective qui éclatent comme des crises de pure folie, et puis il y a ce rire dément et libérateur quon ne peut sempêcher de laisser séchapper, non sans honte de rire de ce qui rationnellement nous semble bien honteux. Et puis il y a ces répétitions, ces scènes qui nen finissent plus, comme ces phrases que les personnages de Beckett répètent comme des maximes absurdes. Ici, on rentre par une porte, on sort par une autre, on rentre par une porte, on sort par une autre, et cet enchaînement ridicule na pas de fin. On en rit, mais on se tourmente parce quon sait quau fond on rit un peu de nous, sans trop savoir ce qui nous ressemble dans tout cela.

Dans le tourbillon vertigineux du non sens, les personnages effectuent un bien étrange rituel, évoluant sur le plateau comme des automates détraqués à laide de petits pas, de petits cris, de petites danses démoniaques, laissant à leurs pieds les traces blanches de leur présence froide et décharnée. Lunivers de Beckett est bien là, ses personnages sont dailleurs clairement représentés en fin de spectacle. Dans ce silence qui en dit long, dans cette horlogerie qui déraille, tous les sentiments que lon peut ressentir en lisant lauteur planent au dessus de cette parade singulière. La force des images et de la chorégraphie réside en dehors de lémotion, dans le déchiffrage de ce qui nous est familier au cur de cette étrangeté. Or, ce déchiffrage nest pas aisé, ce spectacle nest donc pas à recommander à un public non initié, ou alors faut-il quil accepte de se perdre dans cette absence de repères.

http://www.compagnie-maguy-marin.fr/

(danse) May B - Maguy Marin

Publié : 11 mars 2009, 17:11
par francesca
merci pour cette lecture de beckett, et de maguy marin


 


aviez-vous vu le spectacle plusieurs fois ? en avez-vous vu d'autres ?

(danse) May B - Maguy Marin

Publié : 17 août 2009, 13:15
par Cécile
Pour découvrir ou redécouvrir May B de Maguy Marin, vous pouvez retrouver des images sur http://www.lequai.tv/fr/bdd/video_id/202