Depuis plusieurs saisons, le Musée d'Orsay nous habitue aux confrontations d'artistes: Millet/Van Gogh, Manet/Velazquez, Cézanne/Pissarro sont au nombre de ces expositions dossiers qui avaient pour but de rapprocher aux yeux du public des artistes dont la démarche où le style présentaient des similitudes. Jusqu'alors, ces expositions se cantonnaient à une confrontation peintre/peintre, symptôme de la volonté de remplir les caisses tant la peinture attire plus les foules que la sculpture. Aussi quelle ne fut pas ma surprise quand j'appris que le Musée d'Orsay se proposait de mettre en parallèle dans une petite exposition dossier la carrière de Rodin et celle d'Eugène Carrière, peintre symboliste méconnu de la fin du XIXème siècle.
Enfin on osait mettre face à face l'huile et le marbre (comme, à ma connaissance, seul le Musée du Petit Palais l'a osé avec sa nouvelle présentation des collections permanentes)
Carton d'invitation en main (c'est ça d'être stagiaire non rémunéré, on est payé en invitations pour des vernissages ) je me rendis donc allègrement à la "petite" exposition du Musée dans les salles qui surplombent le hall principal de l'ancienne gare. Et là, mes enfants, je fus conquis!
Le propos de l'exposition se fonde sur l'amitié entre les deux hommes ainsi que l'influence qu'ils ont pu exercer l'un sur l'autre. Et l'on commence avec les portraits que Carrière fit de Rodin (un texte nous explique que Rodin ne fit jamais de portrait de son ami et que pris de remords, il obtint d'effectuer un moulage de ons visage après sa mort en 1906. Le masque mortuaire ainsi obtenu est présenté dans la salle des portraits). Face à ses tableaux et aux oeuvres de Rodin présentes dans la première salle, le spectateur comprend immédiatement la parenté entre les deux hommes: ce même goût de l'inachevé, cette même sensation de voir émerger les formes de la matière: le marbre travaillé en facettes pour Rodin et les fonds dilués et brumeux, dans des tons bruns-ocres de Carrière. (cette technique est héritée de la technique dite du "sfumato" instaurée par Léonard de Vinci et qui consiste à donner à l'oeuvre un aspect flou et brumeux)
Pour le reste, les deux hommes se rejoignent aussi dans le goût pour le symbolisme et le corps féminin. On notera la prédilection de Carrière pour les Maternités (bien que l'exposition tente de démontrer que l'artiste n'est pas qu'un peintre de femmes et d'enfants sans trop y parvenir, il faudrait pour nous en convaincre voir plus d'oeuvres de l'artiste, pourquoi pas au sein d'une retrospective personnelle) ce qui l'éloigne de Rodin qui n'a que très rarement abordé ce thème, préférant se consacrer au caractère charnelle de la femme plutôt qu'à la relation mère-enfant.
L'exposition s'appuie aussi sur une base documentaire assez riche: lettres, film sur la carrière de Carrière (désolé je n'ai pas pu m'en empêcher) afin de nous faire mieux pénétrer la relation de ses deux hommes. Relation qui ne se borne d'ailleurs pas uniquement à une influence réciproque mais qui va jusqu'à la collaboration comme pour l'affiche de l'exposition personnelle de Rodin au Pavillon de l'Alma en 1900 qui fut réalisée par Eugène Carrière.
Le travail des commissaires s'est aussi tourné vers les penchants politiques de Carrière et notamment sur sa participation au journal l'Aurore et sur ses convictions dreyfusardes. Cela permet de mieux saisir la personnalité de ce peintre que sa peinture ne nous permet pas de découvrir véritablement.
Enfin les deux dernières salles sont consacrées aux similitudes et aux différences existant entre les deux hommes dans la façon de préparer leurs oeuvres: dessins de mains, études de corps féminins. Ces deux salles sont particulièrement intéressantes et stimulantes pour le regard du spectateur qui est vite tenté de reconnaitre l'artiste ayant réalisé l'étude sans regarder le cartel!
Pour ce qui est de la muséographie, l'ensemble est très cohérent et les couleurs sobres du fond permettent de profiter pleinement des oeuvres exposées mais le fait d'avoir placé certains textes juste avant le passage d'une salle à une autre créée de sérieux bouchons tant ses passages sont étroits.
Au final, je mets 9 pour cette exposition intelligente et belle, un régal pour les yeux, un plaisir pour les neurones.
Rodin/Carrière - Orsay
Rodin/Carrière - Orsay
Rah, c'est fou tout ce qu'on peut louper d'intéressant quand on habite en province !!! C'est trop injuste
En tout cas très bien la critique (Et je ne dis pas ça (que) par esprit de contradiction ^^)
En tout cas très bien la critique (Et je ne dis pas ça (que) par esprit de contradiction ^^)
La petite folle monstrueuse
- Manfred Jix
- Messages : 0
- Inscription : 04 juillet 2006, 14:07
Rodin/Carrière - Orsay
Se procurer les catalogues d'exposition est pafois un bon moyen de diminuer sa furstration de ne pas être sur place Danorah. Surtout qu'à Nancy je suppose qu'il y a une bonne bibliothèque municipale où trouver certains catalogues d'exposition non?
Rodin/Carrière - Orsay
Le problème des catalogues d'expositions c'est que c'est très très cher ! (D'ailleurs si un jour vous ne savez pas quoi m'offrir, offrez-moi celui de l'expo sur l'art russe à Orsay )
Par contre j'avais jamais pensé à aller voir à la bibliothèque s'ils en avaient, il faudra que je me renseigne, c'est une bonne idée.
Par contre j'avais jamais pensé à aller voir à la bibliothèque s'ils en avaient, il faudra que je me renseigne, c'est une bonne idée.
La petite folle monstrueuse
- Manfred Jix
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- Inscription : 04 juillet 2006, 14:07
Rodin/Carrière - Orsay
[url=http://fr.parisinfo.com/rub7630.html?OT ... =evenement" title="Un lien avec quelques informations pratiques sur l'exposition"> Un lien avec quelques informations pratiques sur l'exposition
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