Nombre de pages : 48
Date : 1988.
A noter qu'il existe sous 2 titres différents : "The Killing Joke " chez DC Comics et, "Souriez" chez Comics USA
Cest lhistoire de deux types dans un asile de fou....
Le Joker sest encore échappé de lasile de Gotham city, et Batman doit (pour une énième fois) le poursuivre et le ramener. Du classique pensez-vous ? Possible, vu que cest ainsi que débute habituellement les sempiternels aventures qui lient nos éternels ennemis. Mais heureusement cette fois-ci la donne est différente. Oui ici le « héros » ce nest plus Batman mais son pire ennemi le fantasque et fou à lier Joker.
On ne compte plus les nombres incalculables dhistoires sur le passé, la vie ou encore le traumatisme denfance de ce cher Bruce Wayne, alias la chauve-souris milliardaire, et décider, pour une fois, de se pencher sur le cas atypique du Joker relève de lexercice de style osé. En effet son aspect clownesque et le peu de sérieux lentourant peuvent rebuter certains. Mais cependant un certain flou émane du personnage. On ne sait pas ce quil a vraiment dans la tête, de ce qui le motive (à la différence dun Wayne/Batman) et une plongée dans son univers absurde nous est ici gracieusement offert. Autant en profiter donc. Bien entendu cela nous laissera pas indifférent car on peut même être sur que le panache sera au rendez-vous.
Rire et Tragédie.
Le Joker a depuis longtemps crée une certaine interrogation chez le lecteur, car là où le justicier masqué luttait avec sérieux et droiture contre la violence ((le crime, linjustice par exemple) voire toutes sortes dennemis, le Joker, quant à lui, pensait et réagissait à tout par labsurde. Pour lui la vie relevait dune vaste plaisanterie. Cette différence bien/mal, identifiée, a servit, depuis le début, de soupapes dans leur affrontement, et en tant que lecteur nous aurions pu penser que les deux protagonistes étaient très dissemblables.
Il nen est rien.
Car voilà quarrive Alan Moore, un génial scénariste anglais travaillant pour DC comics. Celui-ci, avec son habituel esprit tordu et absurde, vient nous analyser, sous un angle totalement nouveau, la relation qui lie les éternels ennemis que sont le Joker et Batman. Deux esprits traumatisés, qui ont cherché en fait chacun de leur coté le meilleur moyen pour fuir le mal qui les ronge (perte des parents pour Wayne, perte dune femme pour le Joker). Et Moore samuse, dans la BD, à faire le reconnaître au Joker alors que Batman, lui, semble le nier.
L'habituel combat entre les deux ennemis se transforme ainsi en une sorte de psychanalyse sur leur trauma commun, et nous avons, au passage,loccasion de connaître le « pourquoi » et le « comment » de cette éternelle lutte entre les deux protagonistes.
Et cela, surtout exclusivement, à travers le regard désaxé du Joker.
Car avant dêtre ce fou furieux appelé le Joker, il y avait une personne : un homme simple. Soit un comique raté (lhumour de Moore est renversant sur cette question) qui tente de survivre avec sa femme enceinte dans une piaule minable. Celui-ci, pour subvenir au besoin de sa famille, est embarqué bien vite dans un hold-up foireux. Bien entendu cela se passe mal, en raison dune part de lintervention de Batman et dune autre part à son amateurisme. On connaît la suite de lépisode, avec cette cuve de produits chimique qui le transforme en Joker ; le rendant fou au passage. Mais le tour de force cest la façon dont cela est traité.
Vu que le récit, ici, est dune précision chirurgicale. Faisant des incessants aller-retour entre passé et présent, dans un découpage au millimètre, entrecoupés deffets de miroirs et/ou de symétries, de dialogues ciselés et vifs à lhumour (très) noir comme cest nous le faire Moore, tout cela emmené par le dessin caméléon de Brian Bolland qui sait avec brio montrer létat mentale des personnages. Et avec le joker nous en avons pour tout les goûts : de la folie furieuse en passant par la tendresse, le désespoir voire la détresse profonde. En clair nous rencontrons son humanité.
Mais, bien entendu, cest une humanité morbide et rigolarde.
Le titre original, littéralement « la blague qui tue », ainsi que la rapidité du récit (et des rebondissement) renforcent à merveille cette idée. On pourrait reprocher cette brièveté aux auteurs mais ne dit-on pas que les meilleurs blagues sont celles qui sont les plus courtes ?
Il est à noter aussi que lhistoire se termine par une blague fendante que Joker raconte à Batman, terminant ainsi en beauté, et sur une note grinçante (le final est toujours redoutable chez Moore), cette histoire haut en couleur.
Pour tout cela, ce one-shot sur lunivers de la chauve-souris, rentrera, sans aucun problème, dans nos curs parmi les classiques tels Batman year one ou Dark-knigth de Miller. Aussi au passage cest une excellente occasion pour découvrir un grand scénariste de bande-dessinée : Alan Moore. Et celui-ci, nétant pas un inconnu, sest déjà illustré depuis longtemps dans dautres séries encore plus renversante mais ceci est une autre histoire
Ma note : 8.5/10
NOTE : lors de sa 1ère édition aux USA, The Killing Joke est sorti un 1er avril.