Alien vs Predator (AVP)
Ou vraisemblablement plutôt : Predator 3, la victoire commerciale.
Que ce soit pour la simple curiosité de constater lévolution des séries Alien et Predator ou par linquiétude de voir ce mélange altérer lhistoire de ces séries légendaires, aucun adepte de ces séries ne peut être indifférent à la venue de ce nouveau chapitre entremêlant ces deux mondes. En effet, le pari est de taille. Soit que AVP arrivera à donner un nouveau souffle enrichissant à ces séries appartenant au passé, soit il en détruira lessence même.
Pour ma part, je ne ressors pas déçu de lexpérience, (À quoi pouvait-on vraiment sattendre dinnovateur ?) mais finalement plutôt frustré. En effet, jai toute limpression que la série Predator sest accaparé un gros monstre sacré du cinéma en incorporant les Aliens à son propre monde, et cela, en épurant la complexité du bagage historique de la série Alien. Dans ce film, les Aliens ne sont que des faire-valoir du super prédateur de la galaxie, ils sont des deuxièmes rôles sans réelle profondeur (tout comme les personnages humains dailleurs). Or la raison dêtre des Aliens sur la Terre nest du quà la volonté des Prédateurs de faire joujou avec eux, si bien que presque tout le long du film, les Aliens ne se retrouveront confinés quaux zones dictées par les Prédateurs.
Ainsi, lhistoire de ce film tourne autour du rituel initiatique et guerrier des Prédateurs. Fait intéressant aussi, nous apprenons davantage sur leur relation historique avec lhumanité et la dévotion que certaines civilisations disparues leur vouaient. Une forme de culte sacrificiel consacré à lespèce qui atteint une perfection mystique par la force pure, lépreuve ultime étant ici de battre un Alien. Or, lêtre humain nest intéressant aux yeux des Prédateurs que dans la mesure ou nous servons à les divertir par une bonne partie de chasse, ou dans le cas de ce film, à générer une « proie » plus évoluée. Pour eux, je crois comprendre que toute vie est un combat que nous devons être dignes de gagner. Cest un peu le darwinisme poussé à lextrême, ou la suprématie dune espèce donnée dépend de sa conquête physique sur les autres espèces prédatrices (de quoi faire plaisir à la politique étrangère étasunienne).
Mais peu importe ce décor intrigant, il ne sert que de fond pour meubler laction, car disons le bien, AVP nest finalement quun film daction dans la lignée des deux premiers volets de la série Predator. Mais à la différence du premier opus, nous navons plus grand-chose à découvrir des Prédateurs, sinon leur culture et leur religion. En conséquence, le concept du Prédateur est dorénavant démystifié. Alors, exit le mystérieux suspense, lhorreur énigmatique, lambiance musicale chargée et les interactions psychologiques entre les personnages. AVP est un film allant droit au but, expéditif et tapageur, qui en définitive est bâti tel un scénario de jeu vidéo. Il savère en effet que lhéroïne (pâle émule de Ripley aux allures de Lara Croft) doit avant tout survivre, puis sortir du labyrinthe pour sauver le monde, cela, sans avoir préalablement confronté la reine Alien (encore) dans une finale autant mécanique que totalement clichée. Irrémédiablement, le scénario est linéaire, tout est prévisible, rien ne nous surprend réellement.
Le rythme est donc brutal et excessivement rapide, les scènes daction y sont stroboscopiques et déroutantes, tout va trop vite, nous narrivons pas à nous situer dans lespace du film. Dune simplicité déconcertante, jamais ce film ne nous laissera le temps de nous mettre dans la peau de ses personnages, lancés ici dans un spectacle tel de vulgaires victimes désignées doffice au Colisée de Rome. Nous regardons donc AVP comme un féroce match à la télévision, cela, sans réelles attaches émotionnelles auxquels nous pouvons nous identifier. Or contrairement aux premiers films de la série Alien, nous ne vivons pas réellement lunivers du film; et nous observons à distance la mésaventure des protagonistes sans trop croire à leur réalité. Pourtant, avec lambiance glauque, claustrophobique et sournoisement mystique dans la pyramide, ce film aurait pu réussir à nous effrayer, mais la cadence empressée du film et la surabondance daction interfèrent sérieusement leffet dramatique de lhistoire.
Côté scénario maintenant, tout va pour le mieux au début. Lintroduction est originale, et sancre à merveille dans la chronologie de la série Prédator. En contrepartie, il savère quen déroulant laction en 2004, ce film devient par le fait même le précurseur de la série Alien, ce qui amène son lot de perplexité. Dailleurs, lutilisation de lacteur Lance Henriksen (Bishop, les androïdes dans Aliens et Alien 3) dans le rôle de Weyland est des plus maladroite; se voulant probablement une tentative dexplication pour lintérêt que porte aux Aliens la compagnie Weyland-Yutani. Mal à propos, ce Weyland humaniste et courageux na rien à voir avec la future philosophie de sa compagnie, qui, recherchant obsessionnellement le profit en manipulant allègrement dans lombre à distance, sera dans la série Alien des plus fourbes et capitaliste. Dautre part, dans le premier épisode Alien se déroulant en 2122, comment expliquer la méconnaissance totale de la Weyland-Yutani pour les Aliens, ceux-ci ayant eu directement affaire à ces extra-terrestres sur Terre en 2004? Par ailleurs, en rapport aux précédents volets de la série Alien, pourquoi avoir considérablement réduit dans AVP le temps de gestation de lAlien dans lhôte si ce nest que pour le bête besoin daccélération de lhistoire du film? Le scénario de AVP est donc cousu de fil blanc, et rend finalement celui-ci discordant avec les précédents opus de la série Alien. Or il y a, quant à moi ici, profanation de lorigine des Aliens dans lhistoire.
Il faut dire que nous pourrions penser que lorigine de mêler le monde imaginaire dAlien à celui de Predator nous vient du petit clin dil fait par le film Predator 2 (1990), nous laissant entrevoir rapidement un crâne dAlien parmi la collection de trophée du Predateur. Toutefois, il nen ai rien, la genèse de cette idée étant bien expliquée dans le dernier fascicule du comic Aliens vs Predator. Cest donc cette première série de comic AVP, écrit en 1989 aux éditions Dark Horse (soit une année avant le film Predator 2), qui est à lorigine du mélange. Dailleurs, toutes les grandes lignes scénariques de notre film AVP y sont déjà présentées : Les Prédateurs implantant sur dautres mondes des ufs dAliens pour leur chasse initiatique, le marquage du visage de lhéroïne à lacide dAlien par un Predateur reconnaissant et ce même personnage central (Machiko, alias Lex dans AVP le film) qui sintégrera éventuellement à un clan de Predateur grâce à ce marquage. Or, étant donné que maintenant les humains sont introduits à la culture des Prédateurs, quil eut plusieurs comics AVP depuis la série initiale de 1989, et surtout, que la fin du film AVP et des plus ouvertes, nous pouvons fort parier pour un éventuel AVP 2 dans un proche avenir. Voilà qui commence à bien expliquer la logique derrière ce mélange une logique commerciale.
En effet, si ce film ne sest pas simplement appelé Predator 3 comme il aurait du, cest quil allait être doublement rentable en utilisant lAlien comme tête daffiche. (Pauvre bête si subtile réutilisée de façon abusive dans un scénario on ne peut plus caricatural). Et que dire du nom Alien versus Predator, une décision marketing où le sujet du film est présenté comme un vulgaire match de lutte sensationnaliste. Nous comprenons ici une volonté de cibler une nouvelle clientèle beaucoup moins mature et critique que les adeptes des séries originales, particulièrement la nouvelle génération qui fréquente davantage les cinémas. Dailleurs, les choix de faire un film court et de dérouler son action en 2004 vont dans ce sens. Ainsi, plus accessible que jamais (13+) et apprêté aux goûts du jour, AVP aura donc tout pour gagner sa part de recettes aux guichets. Cependant, AVP risque fort bien de diminuer la valeur cinématographique de la série Alien, ou pire, de perdre les vrais amateurs du genre qui ont maintenant vieilli (mais ça cest comme lordre 937 dans le premier Alien toute autre considération est secondaire et l'équipage peut être sacrifié). Voilà donc lodeur de la recette du film vite fait et impérativement rentable.
En conclusion, jaurais à la rigueur accepté ce film sil avait assumé son titre de Predator 3, quitte, pour les besoins du scénario, à faire lemprunt attentionné des Aliens. Mais dimposer par le titre le nivellement de la série Alien à celle de Predator, cest un envahissement du deuxième sur le premier. Par les Aliens, la série Predator sest donc appropriée des monstres de choix pour relancer sa notoriété, quitte à sacrifier au passage celle de sa victime. Finalement, nous pouvons donc affirmer que dans AVP, le Prédateur aura eu la tête de lAlien. Mais, comme le dit si bien le sous-titre de AVP, peu importe dans cette histoire qui sera le vainqueur, nous perdons car nous irons par troupeaux contribuer aux guichets de la 20TH Century Fox.
Ma note sur 10
7.5 dans la perspective Predator
2.5 dans la perspective Alien
5 dans la perspective néophyte
Aliens vs Predator [Film]
Aliens vs Predator [Film]
Vosu pouvez en débattre sur http://forum.krinein.com/ftopic870.php& ... t=predator
Aliens vs Predator [Film]
autrement chapo la critique n'est pas mauvaise et il setais mieux de la deplacer dans la catégorie critique des internautes.
tu l'a vu aux states
tu l'a vu aux states
Aliens vs Predator [Film]
Oui très bonne critique très complète qui ne donne pas forcément envie de voir le film
13+??? bah zut alors, je crois que je vais zapper ce film
13+??? bah zut alors, je crois que je vais zapper ce film
Rêve américain. Cauchemar indien. Pogo avec les loups.
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