Pour une fois, j'aimerais non pas critiquer un ouvrage, mais un auteur.
Pourquoi choisir cet auteur ? Parce qu'il est méconnu, trop méconnu au vu de son talent et de son oeuvre.
Qui est Jean d'Aillon ? Et bien c'est un docteur en....économie. Mais il s'est trouvé que cet homme a une hobby, et cet hobby est l'histoire, en particulier celle du Grand Siècle (le XVIIème, celui de Louis XIV), et s'est beaucoup intéressé à Mazarin, d'Artagnan, Anne d'Autriche et consorts. Mais il faut savoir qu'il s'est aussi intéressé à d'autres périodes de l'histoire avec un point commun à toutes ses recherches : la ville d'Aix.
Mais ce ne serait qu'une occupation personnelle si Jean d'Aillon n'avait pas eu envie de raconter ce qu'il savait. Mais il a choisi de ne pas raconter l'histoire comme le feraient Jean Markale ou Georges Bordonove, à savoir par des documentaires (excellents au demeurant), mais par des romans, historiques donc.
C'est pourquoi il créa la série intitulée
Les Mystères de Provence, série en 13 tomes pas encore tous parus, mais comprenant en son sein une série particulière, dont je vais parler plus précisément, les aventures de Louis Fronsac, notaire, entre 1638 et 1669.
Cette série est, elle, déclinée en 7 tomes, couvrant chacun une époque particulière. Elle narre l'histoire d'un obscur notaire (donc, logiquement, fils de notaire...) nommé Louis Fronsac. Celui-ci se rend à Paris, et aura dans chacun des romans des énigmes à résoudre, énigmes qui le rendront de plus en plus célèbre, le faisant accéder au rang de chevalier, puis de Seigneur d'une petite terre au Nord de Paris.
Chacune de ces histoires est indépendante, mais on y retrouve les personnages principaux du récit (Louis Fronsac, sa fiancée puis sa femme Julie de Vivonne, Gaston de Tilly son ami) ainsi que des personnages historiques qui reviennent régulièrement et qui prennent une part plus ou moins importante dans le récit suivant le roman. Ainsi, on a plaisir à voir le héros aider un certain Jean-Baptiste Poquelin de prison, à rencontrer un provincial inconnu répondant au nom de de la Fontaine chez un de ses amis, ou bien de gagner l'estime d'un guerrier répondant au nom de guerre de d'Artagnan. Cette immersion rend la lecture très plaisante, et on s'attend à chaque page à voir notre héros croiser Racine, Corneille ou bien Fouquet.
Le style de l'auteur est en effet très agréable. La reconstitution historique est magistralement menée, chacun des costumes des personnages étant décrit, par exemple (même si, à la longue, ces descriptions peuvent être rebutantes, on se rend compte de l'importance du "paraître" à cette époque). L'auteur se permet de plus quelques remarques non dénuées d'humour :
"Elle était vêtue de cette simple jupe droite de velours appelée la modeste et qui recouvrait deux autres jupes : la friponne, que l'on apercevait parfois, et la secrète que l'on ne pouvait qu'espérer."
Mais l'aspect vestimentaire n'est pas le seul à être précisément rendu. sont évoquée également la cuisine, la médecine, l'architecture, la stratégie militaire, tout cela sans sombrer dans le "trop d'informations", comme le fait par exemple Da Vinci Code, ceci au détriment du récit.
Car le récit est loin d'être dénué d'intérêt ! Il réussit en effet le tour de force de concerner des personnages ayant existé et des complots contre l'Etat sans créer d'anachronismes : tout ce qui est raconté pourrait avoir existé, la biographie des personnages historiques n'en serait pas changée. L'auteur s'accorde de plus à la fin de chaque tome un "prolongement" de son récit dans lequel il raconte le futur des personnages historiques rencontrés, manière de recoller la fiction à la réalité.
Les histoires racontées par d'Aillon partent en effet souvent de réalités historiques. Par exemple, L'exécuteur de la haute justice raconte à sa façon les problèmes créés par la succesion du duc de Rohan, chef des huguenots, qui aurait un fils caché. Sur ce mystère de départ viennent se greffer différents évènement inventés par l'auteur, mais la conclusion finale du livre correspond parfaitement à la réalité contée par les ouvrages historiques.
A propos des évènements, justement, ne vous attendez pas à un polar insoluble dans la ligne du Mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux ou du Nom de la rose d'Umberto Eco. Les énigmes posées sont vraisemblables, et on ne connait pas la vérité à l'avant-dernière phrase du dernier chapitre : le récit avance avec les raisonnements de Fronsac, mais les "sorties" sont nombreuses : déjeuners, rencontres avec divers personnages, discussions politiques ou architecturales voire ragots de la Cour viennent très fréquemment interrompre le récit, ce qui lui rend plus vivant. Mais n'espérez pas revivre l'angoisse du Nom de la rose dans ces romans. Certains passages contiennent un peu de suspens, mais pas d'arrêt cardiaque en vue. Ainsi, fanatiques de thrillers, passez votre chemin.
Un des intérêts principaux de ces livres est la connaissance apportée, les descriptions étant fidèlement contées. On assiste ainsi par exemple à des scènes de rendez-vous mondains, de torture voir d'exécutions rendues extrêmement fidèlement. On en apprend aussi beaucoup sur des professions à l'époque, comme notaire, bourreau, reître (spadassin) ou encore grand seigneur !
En résumé, une série de livres absolument passionnante, relativement égale, et surtout fidèlissime à l'histoire. Seul bémol : un petit déséquilibre par moment entre trop de descriptions et trop peu de "policier". Rien de bien grave cependant.
Note finale : 9,5/10
Jean d'Aillon - [auteur]
Jean d'Aillon - [auteur]
Longs ou pas...ce n'est pas un livre qu'on finit en une heure trente, mais ce ne sont pas non plus des "Da Vinci Code" de 800 pages. Ils font un peu moins de 300 pages, et sont en ce moment réédités en poche (avant, ils n'existaient qu'en "beaux" livres).
Et ils se lisent très agréablement rassure-toi
Et ils se lisent très agréablement rassure-toi

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