
Quand on pense à MC Solaar, le mot "paroles" nous vient tout de suite à l'esprit. Depuis Qui Sème le Vent Récolte le Tempo, il a en effet toujours été fidèle à des textes bien écrits, recherchés, formant parfois de très beaux poèmes. Après un Mach 6 décevant, Solaar revient donc ici avec Chapitre 7 dont le single Da Vinci Claude ne permettait pas d'envisager grand chose, tant l'artiste est marginal dans le milieu rap. Aussi, très peu de morceaux ont pu être diffusés sur les réseaux p2p, et le prix relativement bas (13e environ) incite à l'achat. Le CD est par ailleurs protégé contre la copie.
Solaar est avant tout quelqu'un qui sait manier les mots de manière très habile, et qui sait s'adapter à son époque. Chapitre 7 est composé de textes aux rimes variées, au vocabulaire à la fois nostalgique et moderne (Carpe Diem). Le thème de la nostalgie est d'ailleurs très largement abordé à travers des récits inspirés de la vie de l'auteur (L'auberge du Bouleau Blanc, Non Merci). Da Vinci Claude s'inscrit dans ce thème, bien sûr; mais Solaar s'amuse plus avec des mots qu'il ne fait passer de message dans ce titre, et il s'avère trop formaté et répétitif. Malheureusement, nous sommes parfois un peu déstabilisés dans les trips lyriques du bonhomme.
On retrouve aussi ce que Solaar décrit comme du "cinéma pour aveugles" dans Coup d'Oeil dans Le Métro par exemple, touchante.
L'album marque surtout une grande diversité dans les ambiances et les sujets traités. De l'atmosphère chaude de Paris-Samba à celle western de L'auberge du Bouleau Blanc, en passant par le style raggae de Clic Clic et l'orientale Mollah Solaar, on ne reste pas sur une impression de monotonie. Cette variété ponctue un album tout de même très personnel et intime. Solaar a généralement sur Chapitre 7 une écriture très efficace, émouvante et empreinte de références. Sur certaines chansons on reste admiratif devant une telle plume - celle-ci mise en relief par des instrus très douces et feutrées, comme dans In God We Trust.
Le côté engagé n'en est pas pour autant oublié, et c'est sûrement là une des plus grandes réussites de Chapitre 7. Intreau avec sa chute frappante, Au Clair de la Lune comparant la vie d'une société en paix et celle d'un enfant du Darfour... Les deux instrus collent parfaitement, la première "coulant" jusqu'à stopper net, la seconde mêlant la mélodie éponyme initiale à du tambourin militaire.
Impact avec le Diable, elle, est vraiment très prenante : le rythme est énervé, les voix allemandes menaçantes, les paroles oppressantes, le tout en un crescendo effrayant à la boucle de piano endiablée. Enfin, Clic Clic dénonce la banalisation des armes à travers une musique chaude, tropicale et joyeuse. Efficace, sobre et intelligent, Solaar accomplit quatre morceaux actuels pleins de sens et de références.
Entre tout ce bon contenu, il subsiste quand même quelques gâchis. Avec Les Loups montre vraiment que Solaar ne doit pas s'essayer au rock; la chanteuse Issara énerve plus musicalement que la superficialité qu'elle dénonce dans Ben Oui!; l'Outro est franchement inutile. Les featurings font un peu intrusion, notamment Sous Les Palmiers avec Black Jack, mal placée. Le seul réussi est à mon avis celui de Bambi Cruz sur Si On T'Demande, où les deux flows complémentaires enchaînent références et paroles mordantes.
Chapitre 7 est donc une oeuvre réussie à la production impeccable, bien que parsemée de quelques petits défauts et essais non-concluants. La variété, la musicalité de ses titres, la richesse des paroles et la cohérence du tout en fait un album bon à l'écoute (et à la lecture).
7,5/10
Proche du 7e ciel